Popcorn Time, vous connaissez ? L’application, symbolisée par un petit paquet de pop-corn qui se fend la poire, permet de regarder films et séries en quelques clics, pas plus. Sa simplicité d’usage la fait ressembler à un Netflix, ou à un Spotify, pour la musique. Sauf que cette plate-forme n’a rien de légal. Et que son histoire est fascinante, tant elle résume parfaitement tous les enjeux de la culture au XXIe siècle..
« En Argentine, Internet est vraiment très lent »
Le créateur de Popcorn Time l’a livrée à un site norvégien, Dagens Næringsliv (traduction en anglais), sortant ainsi pour la première fois de l’anonymat.
Federico Abad, un développeur argentin jusque-là connu sous le nom de « Sebastian » (ou de « Pochoclín », popcorn en Argentine), raconte ainsi avoir eu l’idée de cette application face à la difficulté d’accéder aux films dans son pays :
« Ici en Argentine, Internet est vraiment très lent. Et les films sortent tard au cinéma, jusqu’à six mois après la première américaine. […] Si vous sortiez avec une fille, vous ne pouviez pas dire : “Hey, regardons un film.” Il fallait d’abord se mettre d’accord sur le film à regarder la veille, et commencer à la télécharger. J’ai pensé qu’il devait y avoir une meilleure solution. »
Lui qui dit pourtant avoir un abonnement aux deux, explique ne pas pouvoir se contenter de Netflix ou de Spotify. Se désole de leur catalogue limité, qui varie fortement entre les pays.
Cette réflexion remonte à janvier 2014. Quelques semaines plus tard, un prototype était prêt. Moins de deux ans plus tard, le tout-Hollywood, ainsi que des ayants droit du monde entier, tentent de contrer ce « Netflix des pirates » :
- aux Etats-Unis, des utilisateurs se sont vu réclamer des centaines de dollars par les studios, pour avoir regardé des films sur Popcorn Time.
- Même chose en Allemagne.
- L’Italie, quant à elle, bloque le bouzin.
- En France, le ministère de la Culture se focalise en ce moment surtout sur la manière de contrer les sites de streaming illégaux et payants – Fleur Pellerin lance un comité de suivi en ce sens ce 10 septembre.Néanmoins, dans la mesure où Popcorn Time mêle du streaming (la capacité de regarder sans télécharger donc sans copier l’œuvre) et du téléchargement (petit bout par petit bout, à mesure du visionnage), l’ancien secrétaire général de la Hadopi, Eric Walter, expliquait au Monde que les internautes français pouvaient être chopés, pour peu que le film regardé soit surveillé.
Testé et approuvé par les mamans
Ce succès, Federico Abad le doit à sa maman. Et à sa lucidité : il avait bien conscience que les logiciels de partage de fichiers, les Kazaa, Napster et autre Vuze, demeuraient, malgré leur succès, un truc de bidouilleurs. Arides, pénibles à configurer.
Son but était de rendre son logiciel accessible au grand public. D’où l’intervention…
La suite sur : Popcorn Time, conte de la culture au XXIe siècle
L’Obs Rue89 – 10/09/2015